Je suis né dans un pays qui n’existe pas,
Je suis né sur une terre qui n’est plus à moi,
Une terre occupée, une terre piétinée,
Une terre autonome sur le papier.
Je suis né sous les you-yous et les cris de joie,
Je suis né après bien d’autres dans le camp trop étroit,
La mer était ma frontière, mon sanctuaire,
Pour oublier les colons et le blocus et la misère.
J’ai grandi bercé au son des récits de l’exil,
J’ai grandi au creux des vies suspendues à un fil,
Le fil d’un espoir tenace dans l’impasse,
Un jour, oui, la tête haute nous aurons notre place.
Nous aurons notre place, nous aurons notre place.
J’ai grandi trop, trop, vite entre deuil et oubli,
J’ai grandi en tutoyant l’horizon infini,
Le sable chaud sous mes pas me portait vers l’au-delà,
Je serai si grand si fort, on ne verra que moi.
J’ai vécu à Gaza sans jamais en sortir,
J’ai vécu de jours en jours sans remords ni soupirs,
Malgré les barbelés, le couvre-feu, les blindés,
J’ai chéri au fond de moi le rêve d’en échapper.
Le rêve d’en échapper, le rêve d’en échapper.
J’ai vécu les vagues humaines de l’intifada,
J’ai vécu cortèges et grèves, drapeaux à bout de bras,
Nous chantions à pleins poumons notre passion,
Tandis qu’au dessus de nous paradaient leurs avions.
Je suis mort, a-t-on menti, d’une balle perdue,
Je suis mort assassiné par un homme inconnu,
Qui croyait faire son devoir en tirant dans le brouillard,
Sur des ombres ennemies aux armes dérisoires.
Je suis mort comme milles autres, mille après mille avant,
Je suis mort un soir d’automne, un soir de ramadan,
Mais je ne voulais que vivre, vivre libre,
Je ne voulais qu’être libre, je ne voulais qu’être libre,
Je ne voulais qu’être libre.