Aux tréfonds de la verte forêt
Toc-toc, on gratte à la fenêtre
Un jeune spadassin en vadrouille
traversait la rivière sur sa route.
Elle était large la rivière1
et la chaumière semblait dormir.
Survint alors une jeunette
ses beaux yeux noirs ensommeillés.
Elle a mis un doigt sur ses lèvres,
si jeune et pourtant effrontée.
Toute large que fut la rivière
il sut bien trouver le cellier.
Je vous dirai une ballade
ou vous réciterai une fable
en échange d'un peu de pain
et de soupe chaude, si vous pouvez.
Elle est bien large, la rivière
mon père le passeur dort là-haut
Puis elle a mis un manteau de laine
et une paire de bottes en daim,
baissant ses beaux yeux noirs lorsqu'il
entrevit l'éclat de sa peau blanche.
Elle est bien large, la rivière
mon père le passeur dort là-haut
Il l'allongea dans la verte forêt
un écureuil et un lapin gambadèrent
Il lui chanta la vieille ballade
dont la mélodie l'enchanta.
Elle est bien large, la rivière
son père le passeur dort là-haut
Il se dirent adieu sur la berge,
il fixa longtemps ses yeux noirs.
Une loutre plongea et disparut
Une oie cendrée dans un ciel de cendre
Elle est bien large, la rivière
son père le passeur dort là-haut
1. lit. "large et profonde"