Comme toutes les gamines
J’avais peur dans le noir
Des choses qu’on imagine
Cachées dans le placard.
Les monstres de pénombre
Ne résistaient jamais
Quand s’allumait dans l’ombre
Ma lampe de chevet.
Et j’ai béni souvent
Dans ces petites paniques,
Les bras de ma maman
Et l’ampoule électrique.
J’avais en ce temps-là,
Des leçons à apprendre,
De l’encre sur les doigts
Et le monde à comprendre.
Professeur de piano
Ou maîtresse d’école
Ont fait voler plus haut
Mon âme de luciole.
Quand je jouais à survivre,
Dessous mes draps en cloche,
À la lueur d’un livre
Et d’une lampe de poche.
J’ai fait feu de tout bois,
Amoureuse tant et plus.
Que la lumière soit
Et la lumière fut !
J’ai grillé des ampoules,
Cramé quelques lampions.
Les nuits où l’on se soûle
De fêtes sans passion.
Mais j’ai eu pour la gloire,
En lettres de néon
Brillant sur les boul’vards,
La moitié de mon nom.
Sur ma vie en morceaux,
Quand trop tôt viendra l’heure
De l’ultime faisceau,
Du dernier projecteur.
Je penserai sans doute
À ces quelques lumières
Qu’on croise sur sa route,
Qui l’animent et l’éclairent :
Les lustres de cristal,
La lampe d’Aladdin,
Une lanterne, une étoile,
Ton sourire, ce matin…
Lors, quand vacillera cette flamme qui est moi,
Cette loupiote nue, ce petit feu de joie
À l’ombre des douleurs, et pour les faire taire,
Je veux pouvoir, moi-même, éteindre la lumière…