Conversation nocturne (Vers le feu clair)
Il dit : Mon cheval est fourbu, mes bottes déchirées,
Vers où dois-je me diriger, dites-moi, je vous prie ?
Vers le fleuve rouge, oui vers le fleuve, mon ami,
Jusques aux monts bleus, mon ami, oui jusques aux monts bleus.
Où est ce pays annoncé, mon cheval n'en peut plus,
Oh dites-moi, je vous en prie, comment y parviendrai-je ?
Va vers le feu clair, mon ami, toujours vers le feu clair,
Oui, va vers le feu, mon ami, tu trouveras sans peine.
Ce feu qui devait me guider, est-il mort, où est-il ?
Voilà bien cent ans que le ciel pèse sur mon épaule.
Celui qui devait allumer le feu s'est endormi,
Il dort, son gardien, mon ami, mais ce n'est pas ma faute.
Déjà il repart, silencieux, dans la lande et la nuit.
Où donc t'en vas-tu, esseulé ? Les ténèbres s'élèvent.
Je crie, oh qu'as-tu donc perdu mon ami, je lui crie,
Et lui me répond, où je vais, je n'en sais rien moi-même.