Du temps que j'étais belle et bien un peu puérile,
Je transformais les hommes en animaux.
Ô combien de marins,
Ô combien d'imbéciles
J'ai changés en pourceaux ?
J'avais de la malice,
Jetant mes maléfices
Aux compagnons d'Ulysse.
Mon nom vous parle encore de légendes anciennes :
On m'appelle Circé et je suis magicienne.
Refrain :
Mutatis mutandis !
Ici je veux un groin,
Un jambon pour la cuisse,
Et qu'il te pousse aux reins
Un curieux appendice !
Mutatis mutandis !
Maintenant je t'impose
La couleur d'une rose
De la tête au coccyx !
Mutatis mutandis !
Si tant est qu'il est vrai que tout dans le cochon
Peut nous paraître bon, dans l'homme non.
Je n'ai fait que donner la forme qui convient
À ces jolis nourrains1.
Prisonniers de mes bauges,
De mon oeil qui les jauge,
De ma main qui remplit l'auge,
Pataugeant dans la boue, pauvres petits humains,
Seriez-vous plus sereins, esprit sains ou porcins ?
Refrain
Mais le temps a passé et j'ai jeté mes dopes
Mes poudre, mes potions, mes sortilèges.
Il y a longtemps qu'Ulysse a rejoint Pénélope,
Entre autre sacrilèges.
Je vais de port en port (je vais de porc en porc)
Voir si je trouve encore
Un homme dans chaque porc (un homme dans chaque port).
Constatant que personne, dans ce monde en déglingue,
Ne met plus de magie au fond de sa seringue,
Quand ce n'est qu'en gorets
Que je les transformais,
Les voici désormais
Enivrés par le fric, le pouvoir, les combines
Changés en charognards, en vautours, en vermine.
Mutatis mutandis !
Ici je veux des dents !
Que ton poil se hérisse !
Qu'il coule dans ton sang
La fureur et le vice !
Mutatis mutandis !
Que brûlent dans ton coeur
La haine et l'avarice !
Et prends du prédateur
La sinistre pelisse.
Sois aveugle et sois sourd,
Et mène au sacrifice
La pitié et l'amour.
(Chœur)
Mutatis mutandis !
1. Cochon de lait qu'on engraisse.