Nous sommes trente mille braves
Au képi sombre, au manteau bleu,
Et nous voyons même les zouaves
Derrière nous courir au feu.
Vous qui voulez qu'on nous supprime,
Qu'avez-vous à nous reprocher ?
En guerre, en paix, notre seul crime
C'est d'avoir su trop bien marcher.
Ne touchez pas au corps d'élite,
Chasseurs, chasseurs, pressons le pas,
Qu'on nous fasse marcher plus vite,
Mais qu'on ne nous supprime pas.
Encore un carreau de cassé
Voilà le vitrier qui passe
Encore un carreau de cassé
Voilà le vitrier passé
Visez-vous à l'économie ?
Des cinq milliards qu'on dut verser,
Nous vous offrons toute notre vie
Pour vous les faire rembourser !
Si vous tenez au drap garance
Qui coûte autant sans valoir mieux,
Notre sang versé pour la France
Rougira nos pantalons bleus.
A nous les coups de main dans l'ombre
Qu'il faut exécuter tout bas.
Notre tenue est assez sombre
Pour qu'on ne la supprime pas.
Encore un carreau de cassé
Voilà le vitrier qui passe
Encore un carreau de cassé
Voilà le vitrier passé
Vous avez vu la Grande Guerre
Faire de nous des Diables Bleus ;
Ce nom, ceux qui nous le donnèrent,
Allez, s'y connaissaient un peu.
Sur tous les fronts, Verdun, la Somme,
Plus de cent fois renouvelés
Nos bataillons comme un seul homme,
Devant la mort se sont dressés.
Chez nous pas de paroles vaines,
Les chasseurs d'Orléans sont là ;
Qu'à leur tombeau on nous enchaîne
Mais qu'on ne nous supprime pas.
Encore un carreau de cassé
Voilà le vitrier qui passe
Encore un carreau de cassé
Voilà le vitrier passé