L'épicière, l'épicière est une sorcière.
Je l'ai vue, je l'ai vue quand elle volait,
A cheval sur un balai,
Filant droit au rendez-vous
Où le diable, je vous l'avoue,
L'attendait.
Il y avait, au fond d'un gouffre,
Des morts brûlant dans du soufre.
L'épicière, l'épicière est une sorcière.
Je l'ai vue, je l'ai vue quand elle sortait
Du tronc d'un cèdre enchanté.
Il y avait, au creux de l'arbre,
Un palais d'or incrusté
Dans du marbre.
Lucifer et Belzébuth
Venaient y faire leurs culbutes.
(Parlé:)
"Bonsoir petit. Qu'est-ce que tu veux ? Quelques olives ou
bien un peu de bon râpé, du saucisson des pois cassés
ou des bonbons ?"
L'épicière, l'épicière est une sorcière.
Je l'ai vue, je l'ai vue dans un placard,
En soutane et fichu noir,
Pendue, le visage exsangue,
En tirant d'vant un bougeoir
Une grosse langue.
Comme j'avais peur qu'elle m'emporte
Vite, j'ai refermé la porte
L'épicière, l'épicière est une sorcière
Je l'ai vue, je l'ai vue par temps de bise
Ricaner au fond d'l'église
Quand ell' grimpe en haut des tours,
Ell' comprend ce que lui disent
Les vautours.
Il paraît qu' monsieur l' curé
En est même très effaré.
(Parlé)
« Eh bien réponds… Qu'est-ce que tu veux… c'est du jambon
ou bien des oeufs, des caramels, du pain d'épice ou des
martinets en réglisse ? »
L'épicière, l'épicière est une sorcière
Je l'ai vue, je l'ai vue quand ell' changeait
En vieux toutou de berger
Le grand-père du sacristain
En disant : « Fais ouah… ouah eh vieux crétin »
Le pauvre homme d'habitude si brave
Avait la gueule pleine de bave…
L'épicière, l'épicière est une sorcière
Quand la pluie tombe la nuit à grands seaux d'eau
Cachée derrière les rideaux
Je ne sais ce qu'elle invente
Pour créer le froid dans l' dos
L'épouvante
"Au secours", disent les enfants
"Faites dodo", disent les parents
Mais dodo ils peuvent pas l' faire
ils ont peur de la sorcière.