Derrière mes rideaux,
je le regarde vivre,
entouré de bruits
et de gens qui l'enivrent.
Leurs éclats de rire
arrivent à ma fenêtre.
Je souffre et je veux
n'en rien laisser paraître.
Je l'aime de loin—
je le regarde sans espérance
comme une biche amoureuse
d'un lion en silence.
Je voudrais qu'il soit malheureux.
Que les autres l'abandonnent un peu
comme un dieu déchu que l'on immole.
Je voudrais qu'il soit malheureux.
Qu'il soit triste, pas trop mais un peu—
juste assez pour que je le console—
je le console.
Que leur trouve-t-il
à ces filles faciles
prêtes à se donner
pour un dîner en ville.
Je ne suis peut-être pas
de mon époque.
Je n'ai jamais su être
celle qui provoque.
Pourtant cette fois,
je saurai courir s'il m'appelle
et oser faire tout pour être
à ses yeux la plus belle.
Je voudrais qu'il soit malheureux.
Que les autres l'abandonnent un peu
comme un dieu déchu que l'on immole.
Je voudrais qu'il soit malheureux.
Qu'il soit triste, pas trop mais un peu—
juste assez pour que je le console.
Je voudrais qu'il soit malheureux.
Qu'on le fuie même comme un lépreux,
à le toucher je serai la première
J'ai assez d'amour pour nous deux.
Qu'il ne m'aime qu'un an s'il le veut.
Moi, je l'aimerai la vie entière—
la vie entière.