[Intro : José Luccioni]
Je vous ai parlé de sa capacité à survivre en milieu hostile, et la manière dont j'vous l'ai racontée ne laissait aucune place au doute. Pourtant, au fond d'moi, j'étais persuadé qu'il partirait avant moi, avant le vieil homme que je suis. Mais, à chaque fois que la mort croit s'en rapprocher, il lui file entre les pattes. Et quoi d'plus dangereux qu'un poison invisible ? Quoi de plus dangereux qu'un prédateur qui s'adapte en permanence à l'environnement qui l'entoure ? La rumeur dit qu'il s'rait à Gibraltar, mais connaissant la réputation d'ce lieu ça m'étonnerait qu'il y soit pour son rocher, ses ruelles colorées et sa réserve naturelle. Douter de sa capacité à survivre, oui, au vu du nombre d'ennemis croissant qui l'entoure. Mais l'imaginer en simple touriste, se baladant dans les allées du jardin botanique, oh non ! Non, ça ça m'semble guère possible. Les seuls jardins qui pourraient l'intéresser appartiennent à des hommes en armes qui, eux, ne cultivent pas les crucifères à fleurs blanches, là-bas, de l'autre côté de la rive. Gibraltar, carrefour sans signalisation où la moindre hésitation se paye cher. Ici, la mer se jette tête baissée dans l'Atlantique, charriant sur son dos, de lourds bolides pneumatiques. D'une berge à l'autre, 39 kilomètres 200 qui s'avalent en 30 minutes. Et la nuit, on y joue au chat et à la souris. C'qui est sûr, c'est qu'un nouvel animal vient d'se joindre à la partie, et à l'évidence, il est bien plus cruel que les deux espèces que j'viens de vous citer. Oui, si la rumeur dit vrai, Dieu seul sait comment tout ça se terminera...