Selon les bergers du dernier village,
derrière les vergers ils verraient quelques pins ;
en passant ces arbres, ils verraient le champs d’oliviers
et, au fond, trois chemins.
Ils ont pris le détour et il s’est ouvert une clairière,
et ils ont ordonné aux hommes de se reposer.
Dans le champ d’oliviers les trois rois disent leurs adieux
et se serrent les mains.
Melchior soulève la tête et voit une montagne
qu’il devrait traverser avant qu’il se fasse nuit ;
il s’enlève la sueur avec le col de sa cape
souillée de boue.
Il ne veut ni penser qu’il est à bout de forces
et ni vous imaginez comme il s’est enragé,
en buvant dans la rivière, quand il voit juste le visage
d’un homme âgé.
Le roi sonne sa trompette pour donner l’ordre,
en pensant à ceux qui, il y a pas longtemps,
embrassaient son blason et déposaient les armes
agenouillés.
Assis sur son chameau, le roi noir pousse un cri
que un bon soldat lui fasse la faveur
de lever son cul de terre et faire un rapide décompte
des rations de pain.
Que quelqu’un traverse le bois et trouve une barque !
Que quelqu’un , avant de s’endormir avec son bras tendu,
note comment ses doits, peu à peu, coupent
l’eau de la mer !
Que quelqu’un aille au palais et choisisse une femme,
cueillisse des roses et lui donne un bouquet !
Balthazar sent le désir passer par ses veines
comme si c’était du sang.
Gaspard sent, cloués à son épaule,
les yeux de quelques pages qui attendent
un moment d’attention, peut-être une main levée,
un ordre royal.
Un des hommes chante au milieu d’un cercle,
avec la voix la plus douce que vous ayez jamais entendue,
une vieille chanson que le roi fredonne
avec ses lèvres fermées.
Le page le plus vieux se tourne et commente,
en donnant un coup d’oeil rapide vers le ciel :
"Il paraît incroyable comme la vie était belle
quand nous suivions une étoile".