Je suis un homme méchant, mauvais de nature.
Un assassin féroce et sans pitié.
Avec préméditation et dans le dos,
de sang-froid, j’ai tué un cafard.
Et mon poignet
n’a pas tremblé.
L’écraser
—couic, couic—
sous mon pied
—couic, couic, couic—
me fait me sentir puissant, comme un dieu
laissant une traînée d’orphelins et de veuves quelque part.
Je suis une mauvaise bête, un mal-né, un animal
Un assassin en série et donc un virtuose. Un artiste.
Jamais ils ne me saisiront, la criminelle ne m’a pas fiché
Je n’ai pas d’antécédents, ni de mobiles, ni de motifs. Je ne laisse pas de pistes.
La « bestiole » n’est pas morte pour une question d’hygiène,
ni parce que cette bête m’horripile.
Je le fais par goût, je suis mauvais de nature
et j’aime tuer pour tuer
et que personne
ne le sache.
Sentir comment couic
—couic, couic—
provoque du bien-être
—couic, couic, couic—,
Un petit plaisir, comme après avoir fumé
un joint chargé hachisch afghan.
Je ne le connaissais pas du tout. C’était seulement un
cafard
qui ne m’avait fait d’autre mal qu’un petit peu de dégoût
Et malgré tout cela, je l’ai laissé sec sans pitié.
Je n’ai pas de regrets. J’ai vécu un moment fantastique.
Je n’improvise jamais, comment faut-il que je le dise ?
Je suis méthodique, scientifique, cérébral
Je choisis le moment du "cafardiside"
à la faveur de la nuit noire
quand tout le monde est au lit
dormant.
Je l’appâte
—couic, couic—
avec des petites miettes de pain,
—couic, couic, couic—
je veille dans le noir fumant dans le sofa
et j’allume la lumière quand il est le plus confiant
Je lui barre le passage et je lui cloue la pointe du pied
qui le laisse étourdit, bougeant sans défense, ventre en l’air,
les pattes vers le ciel tremblant, à la merci de mon
quarante-deux... de pied. Suis-je ou ne suis-je pas un dieu ?…. Pas tellement.
Quand mon pouls récupère, de l’adrénaline
je nettoie avec soin la scène du crime
et je retourne détendu aux routines
de bon père et mari amoureux
où je cache les pires
instincts.
Vous connaissez déjà
—Toi, toi… ah—
mes péchés, mais
—Toi, toi, toi… ah—
vous ne savez pas qui est le pécheur,
faites attention, car un serviteur
vous contracte le goût de faire du nettoyage impunément
et aujourd’hui un cafard, demain…. Qui sait où le tortueux chemin des passions mènera celui qui est mauvais
mais très mauvais, mauvais de nature.