Dans ce petit café où ne veulent entrer
ni la lumière de la rue, ni les gens sensés
je trouvai ton regard mélancolique et lointain
comme le brouillard qui naît au port, le matin.
Je te pris une main et tu me suivis dans la nuit
comme un petit chien perdu qui demande une caresse.
Tu emplis de couleurs la tristesse de mon lit
des rougeoiements du couchant et des verts de Galice.
Et mon souvenir fut
ton souvenir aussi
Tu étais jeune et belle.
Je commençai à jouer
et j’en arrivai à t’aimer
petit à petit.
Je m’accoutumai peu à peu à ton nom
à ta chaleur et à tes paroles,
au bruit de ton pas montant les escaliers
et à ta façon de dresser la table.
À l’odeur de tes mains, qui chaque nuit
entouraient mon corps comme une fine gaze.
Mais tout s’effondra quand je t’entendis dire
“Je m’en vais chercher le soleil. La maison est très sombre”
Personne ne m’attend
Merci pour tout Joan…”
Tu étais jeune et belle.
S’en alla soudain
tout ce que je perdis
petit à petit
Je sentis tant de froid ces nuits d’été.
Je maudis mille fois la petit taverne…
Combien de soirs suis-je allé porter ma peine à la rivière !es
Combien de nuits ai-je passé en blanc comme la lanterne !
Mais je m’accoutumai aussi à vivre tout seul
sans déchirer les papiers,ni les photographies.
Si j’ai faim, je mange du pain. Si j’ai froid, j’allume du feu
et je pense : “si aujourd’hui il pleut, demain, demain il fera beau”
Et je retourne au café
et je pense que peut-être
tu es jeune et belle
Mais le temps est passé
et moi, je t’ai oubliée
petit à petit.