Père Noé, qui plantâtes la vigne ;
Vous aussi, Loth, qui bûtes ou rocher,
Par tel parti qu'Amour, qui gens engigne, (1)
De vos filles si vous fit approucher, (2)
(Pas ne le dis pour le vous reproucher), (3)
Architriclin, qui bien sûtes cet art,
Tous trois vous pri que vous veuillez prêcher
L'âme du bon feu maître Jean Cotard !
Jadis extrait il fut de votre ligne,
Lui qui buvoit du meilleur et plus cher ;
Et ne dût-il avoir vaillant un pigne,
Certes, sur tous, c'étoit un bon archer ;
On ne lui sût pot des mains arracher,
Car de bien boire oncques ne fut fétard. (4)
Nobles seigneurs, ne souffrez empêcher (5)
L'âme du bon feu maître Jean Cotard !
Comme homme bu (6) qui chancelle et trépigne
L'ai vu souvent, quand il s'alloit coucher ;
Et une fois il se fit une bigne, (7)
Bien m'en souvient, à l'étal d'un boucher.
Bref, on n’eût sû en ce monde sercher
Meilleur pïon, pour boire tôt et tard.
Faites entrer, quand vous orrez hucher (8.)
L’âme du bon feu maître Jean Cotard !
Prince, il n’eût sû jusqu’à terre cracher ;
Toujours crioit : " Haro, la gorge m’ard " (9)
Et si ne sût onc sa seuf (10) étancher,
L’âme du bon feu maître Jean Cotard.